Archives mensuelles : décembre 2005

Elisso est Géorgienne. On ne peut pas vraiment dire qu’elle soit jolie, mais il faut la voir en costume traditionnel. Pour la soirée de l’école elle a sortie un ensemble dont la plus récente des pièces devait avoir a moins cinquante ans et la plus ancienne deux cents. Elle était accoudée à la table, fumant son cigare pendant qu’elle racontait ses souvenirs de géorgie. Son oncle s’amusait à tirer à la kalachnikov au-dessus d’elle lorsqu’elle jouait du piano, ce qui faisait évidemment tomber les plâtres du plafond. J’étais surpris de la voir fumer car elle a l’habitude de priser, un tabac géorgien dont elle fait venir un plein paquet tous les ans. Elle porte toujours sur elle une petite boite cylindrique qui ressemble à s’y méprendre à une boite à shit, remplie d’un poudre noire plutôt suspecte. J’attends avec impatience le moment où elle se fera contrôler par la police. Une étrangère porteuse de poudre… Elle fera connaissance avec l’hospitalité coutumière de la police française. Ce qui pourrait arriver plutôt que prévu d’ailleurs puisqu’Elisso boit comme un trou et fume comme un sapeur. Ca ne l’empêche pas, en bonne orthodoxe, de préparer Noël par la pénitence de l’avent. Elle se prive de tout ingrédient issu d’un animal. Viandes, poissons, œufs, évidemment, mais aussi lait, beurre, huiles animales… Elle fait malgré tout relâche le samedi et le dimanche, et c’est alors un plaisir que de la voir se goinfrer des plus gros steaks qu’elle trouve. L’inconvénient de cette orthodoxie, c’est le décalage des dates de Noël et du nouvel an. Alors qu’après le 25 décembre, nous croyons être débarrassé de ses exigences qui peuvent être délicates à assumer au restaurant, nous en avons repris jusqu’au Noël orthodoxe, à la mi-janvier. Car lorsqu’Elisso jeûne, et bien qu’elle se moque de notre propre consommation, ses récriminations continuelles, ses vérifications poussées sur la qualité des aliments sont parfois troublant pour qui n’a pas l’habitude. Un jour advint qu’après l’école nous nous sommes dirigés vers le restaurant de Maurice, la véritable cantine du quartier. La réception qui s’apprêtait à être homérique fut assez fraîche. A la vérité, on ne le dut pas au régime particulier qu’elle s’imposait, mais plus probablement aux bouteilles renversées, et aux raffut qui accompagna notre installation aux tables serrés du restaurant. Il fut dire que nous avions préalablement fait escale dans un bar voisin où nous avions ingurgiter force bières et alcools de toute sorte.