L’édition du jour du Parisien nous apprend que le Parti communiste a demandé (et obtenu !) l’expulsion de squatteurs d’un immeuble au 149, rue du château dans le 14ème arrondissement.
Au-delà du changement de posture entre le parti qui prône la mise en commun des richesses dans le préambule de ses statuts et le parti propriétaire qui a visiblement beaucoup de mal à mettre en application ses principes, cette expulsion, sans décisions de justice et en plein hiver, pose de nombreuses questions juridiques.
En effet, les forces de l’ordre seraient intervenues en « flagrance », suite à une plainte du Parti Communiste, et les squatteurs doivent être poursuivis prochainement pour « dégradations de biens prives en réunion. »
On espère pour lui que le Parti dispose de quelques preuves de ce qu’il avance, car les témoignages disponibles font plutôt état de personnes installées dans les lieux depuis plusieurs jours, donc bien au-delà du délai de flagrance. Les photos des affaires embarquées dans un camion montrent d’ailleurs bien la réalité du domicile des occupants. On attendra également quelques preuves de dégradations lourdes susceptibles d’être considérées comme un délit. J’avoue que j’ai des doutes.
Les explications du secrétaire de la fédération de Paris ressemblent à toutes celles des propriétaires pris la main dans la vacance : qu’on se le dise, pour le propriétaire, un squat est toujours dangereux, quand bien même il viendrait d’être inaugurer ! Au vu du nombre de sociétés immobilières détenues par le parti communiste, (ma préférée étant la SCI Leninvest…) ils doivent savoir également que le péril fait l’objet de dispositions légales permettant une évacuation immédiate quelque soit la période de l’année. Les architectes de sécurité de la préfecture de Police de Paris, seuls habilités à déterminer le péril, ont des astreintes régulières pour être en capacité de faire des constats à n’importe quelle heure du jour ou de la nuit en cas d’urgence. La procédure est purement administrative, le statut et la durée de l’occupation importent peu. Encore faut-il qu’il y ait péril !
Si les communistes ont choisi la voie pénale, c’est bien parce qu’ils savaient ne pas pouvoir obtenir une expulsion pour péril.
Dénoncer un squat politique mené par des militants anarchistes est bien beau, mais même dans le cas où ce serait vrai (et on peut avoir quelques doutes en l’espèce, vu l’absence de revendication et la tentative de négociation préalable) ça n’autorise pas pour autant à expulser. Il convient de rappeler que la politique n’est pas exorbitante du droit commun.
Pourtant, Hélène BIDARD, Présidente-Directrice-Générale de la Société Immobillière propriétaire de l’immeuble, donc celle qui porte la plainte a de fort beaux mots au Conseil de Paris pour parler de la crise du logement, qu’elle connaît bien en tant que présidente d’un bailleur social (SEMIDEP) :
Par un vœu, notre groupe demande que la Ville mette à disposition tous les bâtiments vacants en sa possession, susceptibles d’être mis à disposition de l’hébergement d’urgence. Si nous parlons d’urgence, c’est que la situation ne peut pas attendre. Lorsque la vie de femmes et d’hommes est en jeu, il est de notre devoir d’agir avec conséquence, et de le faire vite.
Les enjeux du logement sont cruciaux, ils répondent à un besoin absolument prioritaire pour les Parisiennes et les Parisiens. A nous d’investir pour se montrer à la hauteur de leurs attentes, et faire de Paris une ville pour tous.
Visiblement, le Parti Communiste a plusieurs manière de comprendre le verbe « investir ».
Image d’illustration issue de Wikimedia Commons, auteur Marie-Lan Nguyen