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Une histoire du 2, rue de Valenciennes

Cadastre Vasserot

Cadastre Vasserot, entre 1810 et 1823

Si vous lisez cette note, vous devez déjà être au courant, mais qu’importe : depuis le début du mois de janvier 2013, l’association Droit au Logement et le collectif Jeudi Noir soutiennent l’occupation d’un immeuble dans le Xe arrondissement de Paris, rue de Valenciennes. (Et, oui, je suis à la pointe de l’actualité…)
Les propriétaires de l’immeuble, comme d’habitude dans ce genre de cas, ont engagé une procédure pour obtenir l’expulsion des occupants. Après quelques péripéties juridiques, le jugement a été mis en délibéré au 11 septembre. Les habitants auront alors une vision un peu plus précise de leur devenir, sachant qu’ils n’ont de toute façon pas vocation à demeurer sur place.
Beaucoup de choses ont été dites sur cet immeuble, et ça fait quelque temps que je voulais faire une série de billet dessus.
Petit aperçu historique de l’immeuble et de sa rue :
Si l’on remonte au début du XIXe siècle, la rue de Valenciennes n’existe pas. Le cadastre de Vasserot, dessiné entre 1810 et 1836, nous montre en effet un seul îlot gigantesque dont seules les franges sont bâties. L’îlot est limité au Sud par la rue de Paradis, à l’Est par la rue du faubourg saint-Denis, à l’Ouest par la rue du faubourg Poissonnière, et au Nord par le chemin de ronde de la barrière de saint-Denis qui deviendra le boulevard de la Chapelle. La barrière, c’est bien entendu la barrière d’octroi qui fixait alors la limite de Paris.
Cette situation ne va pas perdurer longtemps. Dès 1823, la rue La Fayette traverse l’îlot en diagonal. Une première partie de ce qui constitue aujourd’hui la rue de Valenciennes est ouverte en 1827, entre la récente rue La Fayette et l’actuelle rue saint-Quentin, comme on le voit sur le plan parcellaire Vasserot-Bellanger (sous le nom de rue Charpentier).
Ce n’est qu’à la fin du second empire que la rue de Valenciennes, qui a pris ce nom en 1845, débouche enfin sur la rue du faubourg saint-Denis. A l’époque, la parcelle n’était pas divisée et allait jusqu’à l’angle des deux rues. Et c’est probablement vers 1910 que cette division a lieu, puisque c’est la date de construction des bâtiments principaux de la parcelle, et celle de l’inscription aux hypothèques d’une cour commune entre la parcelle occupée et la parcelle d’angle nouvellement créée.
On retrouve la trace de l’immeuble dans un permis de construire en date de 1985, qui prévoit la démolition du hangar occupant la cour principale et la création d’un accès pour les voitures sur la rue de Valenciennes, et dans une demande de ravalement en 1992.
En 1993, une portion du sous-sol, à près de 18 mètres sous la surface, est expropriée pour permettre le passage du RER E alors en travaux.

C’est en mars 2004 que le propriétaire actuel, la société en nom collectif du 2, rue de Valenciennes, acquière l’ensemble pour un prix de 2 765 000 €. Un temps envisagée par le ministère, la réquisition de l’immeuble n’est plus à l’ordre du jour, car la SNC a mis en vente l’immeuble. La mairie de Paris, toujours en recherche d’emplacement pour développer le parc social dans cette zone en déficit, souhaite logiquement le préempter. Aux dernières nouvelles, les négociations achopperaient sur l’aspect financier, la ville de Paris ne proposant que 4 300 000 € (plus-value de 56 %) quand la SNC demande 7 200 000 € (plus-value de 160 %).
En absence d’accord amiable, c’est le juge de l’expropriation, intégré au TGI de Paris, qui aurait a fixer le prix de vente, en le justifiant par comparaison de ventes équivalentes, afin de ne spolier aucune partie.

Si vous avez noté que je n’ai pas encore parlé de la surface du bâtiment, c’est qu’en absence de relevé des bâtiments, il y a une incertitude sur cette surface : dans un document juridique, les propriétaires donnent une superficie de 1 745 m², quand le permis de construire de 1985 n’en donne que 1 348, alors que l’ensemble immobilier n’a pas fait l’objet de travaux d’agrandissement depuis. Il y a là une incohérence sur laquelle la justice devra se pencher.

Petites saloperies habituelles

Cour administrative d'appel de Paris

Cour administrative d’appel de Paris

L’été c’est la période des vacances, de la plage et du farniente. Presque tout le monde en profite, et même si l’on n’a pas les moyens de partir, le rythme est souvent plus léger. Mais l’été, c’est aussi la période rêvée par le gouvernement pour faire passer un tas de petits décrets emmerdants, susceptible de faire grogner les Français. Profitez-en, ils pensent à autre chose. Et comme on est dans le décret, pas besoin de débat, pas besoin d’Assemblée, il suffit à l’administration de se réunir dans un ministère pour imaginer le texte. A la rigueur, si c’est important, on demandera l’avis du Conseil d’État.

Et là, Boum ! Ce sont les avocats spécialisés dans le code de la route qui ont levé le lièvre en premier. Par un décret publié le quinze août, pour un certain nombre de contentieux administratifs, le gouvernement supprime tout bonnement la possibilité de faire appel des décisions de justice. C’est valable donc pour les litiges liés aux permis de conduire, mais surtout, ce qui m’intéresse ici, c’est valable pour toutes les procédures DALO.

Alors, il faut comprendre le gouvernement, on fait des lois, on fait des lois, et quand on s’aperçoit qu’elles ne sont pas applicables, parce qu’on ne veut pas s’en donner les moyens, on est bien emmerdé ! Surtout quand on aggrave le problème en maintenant la politique sarkozyste d’expulsion massive, au lieu de revenir à la sagesse qui prévalait avant.

L’inconvénient, quand on donne des droits aux pauvres, c’est qu’il y en a toujours quelques uns pour essayer de les faire respecter. Oh, pas beaucoup, en proportion, mais ça suffit à engorger les tribunaux. (Oui, les pauvres sont nombreux…)
Plutôt que de résorber la crise du logement et de l’hébergement, plutôt que de donner quelques moyens à la justice, pourquoi ne pas supprimer une étape ?
Jusqu’alors, en cas de recours contre une décision administrative, il y avait trois étapes successives : le tribunal administratif, la cour administrative d’appel, puis le Conseil d’État. C’est le passage intermédiaire qui, dans une demi-douzaine de domaines, est purement supprimé.

Vous me direz, ce n’est pas bien grave puisqu’il reste le Conseil d’État ? Sauf que… Sauf que plaider devant ce Conseil n’a rien à voir avec un recours devant une cour d’appel. Il faut passer par des avocats spécialisés, la procédure est plus complexe, plus coûteuse. N’oubliez pas qu’on parle de personnes qui n’ont pas de logement adapté, voire pas de logement du tout. Imaginez suivre tout ça, quand vous êtes ballotés d’hôtel en hôtel.

L’accès à la justice est clairement déjà un problème (sans parler de certaines décisions). Dans la pratique, le gouvernement compte clairement sur le très faible nombre de recours pour, par exemple, procéder à des expulsions illégales sans trop de risque. Avec ce décret, il rend encore plus difficile cet accès. Une vraie petite saloperie du 15 août.

Pauvre Église !

Cécile Duflot ne s’attendait peut-être pas à une telle volée de bois vert en demandant à l’Église de mobiliser ses bâtiments vides pour loger des sans-abris. Attaque en règle contre l’Église, Cathophobie… Les réactions les plus virulentes, d’ailleurs, ne venant pas de l’Église mais plutôt de la droite. Il est vrai que pour l’UMP, toute polémique qui fasse parler d’autre chose est en ce moment bonne à prendre. La partie la plus militante et sociale de l’Église, s’est sentie un peu en porte-à-faux, face à des propos qu’elle ne partage pas vraiment.

On entend citer l’Évangile selon saint-Luc, la paille dans l’œil de ton voisin et la poutre dans le tien. Pourquoi ne pas mobiliser les bâtiments de l’État, avant de s’en prendre à l’Église ?

Benêt. À qui croyez-vous qu’appartiennent les centres d’hébergements d’urgence ? De la direction générale de l’aviation civile à la direction régionale du travail, l’État utilise son patrimoine, celui de la SNCF, celui des collectivités pour héberger. Il y a bien entendu encore à faire : je rêve de voir la direction générale de la gendarmerie, servir de centre d’hébergement. Mais elle fait 3 000 m², pas 10 000 ! A Paris, le patrimoine vacant de l’État est inférieur à celui de l’Église.

À droite, Nombreux sont ceux qui ont parlé de fantasme, à propos du patrimoine supposé de l’Église. Et de rappeler 1789 et 1905, quand l’État totalement spolié le clergé, deux fois de suite.

Pourtant, il y a visiblement de beaux restes. Alors certes, ce ne sont pas les archevêchés qui sont les plus riches. Et beaucoup au sein de l’Église agissent en faveur des plus démunis, ce qu’a toujours reconnu Cécile Duflot. Mais le tableau dressé par le Canard Enchaîné, à Paris, vaut quand même le coup d’œil. Il ya des congrégations qui sont (très) riches. Et peut-être même un peu égoïste.

Sur dix bâtiments cités par l’hebdomadaire, un seul, il est vrai, est totalement vide. Les Petites Sœurs des Pauvres cherchent en effet à vendre leurs 6 600 m² habitables du boulevard Murat. La mairie de Paris est très intéressée, pour y construire des logements, en partie sociaux, et une maison de retraite. D’autant qu’avec un coefficient d’occupation du sol de 0,65 on peut facilement densifier la parcelle sans pour autant détruire l’environnement urbain. Problème, les 35 millions d’euros proposés par la mairie ne satisfont pas l’appétit financier des petites sœurs des pauvres, On raconte aussi que Vincent Bolloré, un voisin, cherche à intervenir dans le dossier, mais ça n’a bien entendu rien à voir avec le rejet que suscite les 90 logements sociaux qui doivent être construit sur le site.

Les autres immeubles dont parle le Canard ne sont pas vides, non. Quatre religieuses par ici, une quinzaine de moines par là, au total sur la dizaine de bâtiment, un peu moins de 180 religieux se partagent plus de 45 000 m². Avec 270 m² par personne, on conçoit en effet qu’ils soient un peu à l’étroit.

Il est assez savoureux d’entendre le frère Jean-Pierre Longeat, président de la conférence des religieux et religieuses de France, expliquer qu’il n’existe pas de recensement du patrimoine des congrégations. Celui du Canard enchaîné ne prétend certainement pas être exhaustif, mais les dizaines de milliers de mètres carrés vacants dont il est question représentent déjà un minimum de 300 millions d’euros.

Alors certes, L’Église est à peu près aussi unie que le parti socialiste et l’UMP réunis. Certes, comme les politiques, l’Église adore multiplier les petites structures financières indépendantes les unes des autres. Je n’ai pas fait le tour de tous les bâtiments, mais il est fort probable que qu’aucun des bâtiments ici n’appartiennent à l’archevêché. Mais, à l’heure où l’Église se veut être une autorité morale pour l’ensemble des Français, catholiques ou non, il ne paraît pas idiot de penser que l’Église peut avoir une autorité morale sur ses congrégations.

Ordonnance de 45 ou Loi de 98 ? (2)

Ce billet est la suite de celui-ci

La Loi de 1998 est plus restrictive, et partant beaucoup plus difficile à appliquer en pratique. Deux difficultés majeures se posent à l’Etat : d’une part, cette loi ne permet de réquisitionner que les locaux appartenant à des personnes morales. Et même, certaines Sociétés Civiles Immobilières (SCI) bénéficient de dérogations empêchant l’application de la loi pour leurs biens. L’autre limitation est la possibilité pour le propriétaire d’échapper à la réquisition en mettant fin de lui même à la vacance, sur simple présentation d’un échéancier. Par ailleurs, la durée de vacance doit être de dix-huit mois au lieu de six pour l’ordonnance de 1945, mais cela influe peu.

Les deux premières dispositions, à elles seules, ont rendu presque impossible les réquisitions lors de la seule tentative du gouvernement Jospin en 2000. En effet, toutes les entreprises concernées ont évidemment présentés des échéanciers de remise sur le marché de leurs biens. Si les engagements pris ont été respectés, il n’y a rien à redire : peu importe que les locaux soient effectivement réquisitionnés, tant qu’ils ne sont pas vides ! Malheureusement, il est à craindre que dans un certain nombre de cas la vacance ait perduré. Dans ce cas, la loi prévoit que la réquisition s’applique, dès que l’Etat constate le non respect es engagements, mais le changement de gouvernement et de politique en 2001 n’a pas permis d’assurer le suivi nécessaire.

La limitation de la réquisition aux seules sociétés est également un problème. Parmi les immeubles vacants, on en trouve régulièrement qui appartiennent, soit directement, soit au travers de SCI, à des individus qui les maintiennent vides pendant des années, voire des décennies. On se heurte ici souvent à des agissements irrationnels, qui, s’ils ne correspondent qu’à une infime minorité de propriétaires au regard de l’ensemble des biens du marché, présentent une source non négligeable de possibilités de réquisitions. Dans la liste d’immeubles fournie par le DAL et Jeudi Noir, les trois immeubles les plus anciens en terme de vacance appartiennent tous à des particuliers. On remonte quand même aux années 80.

La Loi de 1998 devait être modifiée par la Loi Duflot, sur deux point : la durée de vacance avant possibilité de réquisition passait à un an, par souci d’uniformité avec la Taxe sur les Logements Vacants, et surtout la suppression de cette possibilité d’échapper à la vacance sur un simple engagement du propriétaire. Il faudra suivre la discussion parlementaire lors du nouveau passage de ce texte après la censure du Conseil Constitutionnel pour surveiller le maintien de ces dispositions et pourquoi pas en profiter pour étendre la réquisition aux personnes physiques.

L’autre différence entre l’Ordonnance de 1945 et la Loi de 1998, c’est le montant des indemnités perçues par le propriétaire. Dans l’Ordonnance, elles sont fixées à l’amiable et doivent correspondre au prix du marché (réglementé à l’époque). Pour la Loi de 98, elles sont fixées par décret, et normalement revalorisées tous les ans par arrêté du ministre du logement, mais je ne suis pas certain que Benoist Apparu ait fait son travail. A Paris, le montant indiqué est de 5,34 € du mètre carré. Compte tenu de la revalorisation prévue dans la loi, ça mettrait le loyer de base à 5,86 € à partir du 1er janvier 2013. Cela peut paraître faible, mais d’une part le propriétaire ne touchait rien avant la réquisition, et surtout, ça correspond malgré tout aux prix des logements sociaux. C’est également le prix du marché Berlinois, pour avoir un point de comparaison international. Peut-être que ce sont nos 30 € qui sont excessifs, en fait ?

Et puis, si quelques UMP trouvent que c’est vraiment scandaleux d’offrir aussi peu d’argent aux propriétaires, il faudra leur dire que le décret a été signé par Dominique de Villepin, Jean-Louis Borloo et Nicolas Sarkozy.

Ordonnance de 45 ou Loi de 98 ? (1)

On a vu que les pouvoirs de Police que le maire tire de l’article L. 2212-2 du Code général des collectivités territoriales ne lui permet de réquisitionner des locaux vacants qu’en cas d’urgence. La crise du logement étant tout ce qu’il y a de plus habituelle, le maire ne peut se substituer à la procédure normale de réquisition. A l’époque où le Conseil d’État se prononce, il n’y a pas de doute possible, la procédure normale c’est celle de l’Ordonnance de 1945. Depuis 14 ans, s’y est ajouté la Loi de 1998. Les deux textes ont évidemment des histoires et des effets qui n’ont rien à voir. Mais, au-delà des circonstances de leurs adoptions, quelles sont donc ces différences ?

Précisons tout d’abord que ces deux textes ne sont plus employés sous ces dénominations là. Ils ont tous deux été intégrés dans le code de la construction et de l’habitation, les articles L. 641-1 à L. 641-14 pour l’ordonnance de 1945 et les articles L. 642-1 à L. 642-28 pour la Loi de 1998. La codification est peut-être bien pratique, mais fait perdre un peu la poésie et l’histoire de notre droit. Pour ma part, je continuerai à nommer ces textes par leurs noms de baptêmes, ça évitera de se perdre dans les numéros d’articles.

L’ordonnance du 11 octobre 1945 a donc été prise au sortir de la seconde guerre mondiale. Au passage, pour mon ami Benoist qui a tendance à qualifier de Soviétique tout ce qui ne lui plait pas, le 11 octobre, c’est sous la présidence du général de Gaulle, avant l’élection de la première assemblée constituante qui a vu la victoire massive de la gauche. Le gouvernement, nommé par De Gaulle forcément sans contrôle d’une assemblée, comprenait alors 22 ministres, dont seulement 2 communistes et 5 SFIO. Ce n’est que plus d’un mois après l’ordonnance qu’entrera en fonction le gouvernement tripartite (MRP, SFIO, PCF).

Destruction de guerre oblige, ce texte permet à peu près tout. Pour en faire bénéficier « les personnes dépourvues de logement ou logées dans des conditions manifestement insuffisantes » et également « les personnes à l’encontre desquelles une décision judiciaire définitive ordonnant leur expulsion est intervenue » (et donc la plupart des squatteurs), les réquisitions peuvent concerner les logements vacants, bien sûr, mais aussi tous les locaux, vacants, inhabités ou insuffisamment occupés. Pour l’ordonnance, sont considérés comme vacants tous les locaux vides depuis plus de six mois, mais également toutes les résidences secondaires. Il est possible par ailleurs de réquisitionner, pièce par pièce, un logement que vous ne seriez pas assez nombreux à occuper. Si vous vivez à deux dans un cinq pièce, la préfecture peut vous imposer d’accueillir un mal-logé chez vous. Un seul, vous avez malgré tout droit à deux pièces « vides ».

Si dans l’écriture de la loi, rien n’empêche d’utiliser aujourd’hui ces dispositions, il est évident qu’en pratique, elles ne sauraient être utilisée qu’exceptionnellement, dans des circonstances très particulières nécessitant des relogements soudains et massifs. Autrement, elles courraient le risque d’être annulées par la justice, non pas pour l’atteinte à la propriété, mais pour l’atteinte au domicile, principe supérieur. D’autres dispositions, toujours officiellement valables, ne sont plus appliquées depuis longtemps : je crois que personne n’écrit à la mairie pour préciser le nombre de pièce dont il dispose chez lui.

Du reste, les derniers exemples de réquisition utilisant cette ordonnance de 1945, sous le gouvernement de Juppé, ne concernaient que des locaux entièrement à l’abandon depuis plusieurs années. Et aucune association, aucun collectif, ne demande aujourd’hui des « colocations forcées », ni même la réquisition de résidence secondaire. Il y a suffisamment à faire avec les biens vides. Et puis, contrairement à ce que certains voudraient faire croire, le droit, mais pas seulement celui de propriété, compte aussi pour nous.

Ce billet se poursuit ici

Réquisition, où est le droit ?

Il est assez cocasse d’entendre de nombreuses voix s’élever contre la réquisition de locaux vacants en invoquant le droit, le droit « sacré » de propriété. Si l’on ne peut pas trop en vouloir aux représentants des propriétaires, – on ne peut pas demander à un Jean Perrin de connaître son droit – il est plus troublant de voir un avocat expliquer posément « on n’a pas le droit de réquisitionner ». Il est même assez plaisant, en tant que squatteur ou militant proche de squatteur, de voir ces personnes s’enferrer dans des explications vaines. J’ai beau rappeler à chaque fois que je le peux que squatter n’est pas illégal, il est certain que les lois protègent davantage les propriétaires. Mais en ce qui concerne les réquisitions, pour une fois le droit est de notre coté.

Les propriétaires et leurs conseils prétendent que le droit de propriété, droit à valeur constitutionnelle par les articles 2 et 17 de la Déclaration des droits de l’homme et du Citoyen, est supérieur dans la hiérarchie des normes, au droit au logement qui n’est qu’un objectif de valeur constitutionnel. On verra que s’ils n’ont pas tort, il leur échappe pourtant quelques éléments.

On entend assez souvent assez souvent que la puissance publique dispose de deux moyens pour appliquer la réquisition, l’ordonnance du 11 octobre 1945, et la loi du 29 juillet 1998. En réalité, il en existe une autre, qui n’appartient qu’aux maires et qu’ils tirent de leurs pouvoirs de généraux de police.  Toutefois, le Conseil d’État, dans une décision du 18 octobre 1989, apporte deux limitations à ce pouvoir : il ne peut être appliqué qu’en cas d’urgence, et à titre exceptionnel lorsqu’il y a un trouble grave à l’ordre public. L’urgence ici ne s’entend pas comme une urgence à reloger, mais plutôt comme la soudaineté de la nécessité du relogement. Dans le cas d’espèce, le Conseil d’État reconnaissait que l’absence de relogement constituait un trouble grave, mais que le maire, prévenu longtemps à l’avance de l’expulsion, ne se trouvait pas dans un urgence lui permettant de recourir à la réquisition « aux lieu et place de l’autorité préfectorale ».

Car dans cette décision, le Conseil d’État considère l’ordonnance de 1945 comme une procédure normale, sans qu’il soit question un seul instant d’opposer un quelconque droit de propriété au principe de la réquisition.

Ce droit de police du maire, donc, ne saurait s’appliquer pour résoudre la crise du logement : si l’absence d’hébergement constitue un trouble grave à l’ordre public, ainsi qu’une atteinte grave à une liberté fondamentale, on ne peut malheureusement pas prétendre que cette crise soit soudaine. En revanche, cette disposition peut, et devrait, être utilisée dans le cas d’incendie, ou de tout autre événement, nécessitant des relogements en urgence. Voilà qui aurait peut-être évité aux habitants du 39, rue Gabriel Péri de devoir occuper la basilique de saint-Denis pour se faire entendre.

L’ordonnance de 1945, par la force des choses, n’a pas été soumise au Conseil constitutionnel. N’ayant pas été appliquée depuis l’apparition des Questions Prioritaires de Constitutionalité (QPC), elle n’a pas profité de la sagacité des Sages. En fait, dans l’esprit du précédent gouvernement, elle était probablement destinée à rejoindre l’ordonnance du 16 brumaire an IX au panthéon des dispositions oubliées.

La loi de 1998, elle, a naturellement fait l’objet d’une saisine du Conseil par au moins 60 députés de l’opposition. Appartenant pour la plupart à la majorité ayant procédé aux réquisitions deux ans avant, en toute logique politique.

La décision qui en découle est intéressante, car les députés avaient utilisé la même argumentation qu’on nous ressort maintenant. L’article 2 de la DDHC dispose : « Le but de toute association politique est la conservation des droits naturels et imprescriptibles de l’homme. Ces droits sont la liberté, la propriété, la sûreté et la résistance à l’oppression. » L’article 17 se fait plus précis : « La propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé si ce n’est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l’exige évidemment et sous la condition d’une juste et préalable indemnité. »

Le Conseil constitutionnel balaye totalement l’argumentaire des tenants du caractère sacré de la propriété, en un seul considérant que je ne résiste pas au plaisir de citer intégralement :

31. Considérant que, si la mise en œuvre de la procédure de réquisition prévue par la disposition contestée n’emporte pas, par elle-même, contrairement à ce que soutiennent les requérants, privation du droit de propriété au sens de l’article 17 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, elle limite néanmoins, pour une période de temps déterminée, le droit d’usage des locaux réquisitionnés ; qu’une telle limitation, alors même qu’elle répond à un objectif de valeur constitutionnelle, ne saurait revêtir un caractère de gravité tel qu’elle dénature le sens et la portée du droit de propriété ;

De manière simple, la réquisition n’est pas une privation de la propriété, ça n’est évidemment en rien comparable à du vol ou une spoliation, comme c’est appliqué en faveur du logement, c’est bien entendu conforme à la Constitution et à la Déclaration des droits de l’Homme et du Citoyen. On notera que l’argumentaire répond également aux critiques pouvant être proférées contre l’ordonnance de 1945.

Il ne reste plus aux représentants des propriétaires qu’à râler contre ces bolcheviks du Conseil d’État et du Conseil Constitutionnel, qui se croient encore sous Staline.

Mais comment pouvait-il en être autrement ? Certes, le droit de propriété est un droit fondamental, en France et ailleurs. Mais il a toujours connu des limites, comme l’ensemble des autres droits. La Loi est faite d’équilibre, et user d’un bien immobilier lorsque son propriétaire ne l’utilise ni n’en tire un quelconque profit n’est pas une atteinte aux libertés fondamentales.

D’ailleurs, les tenants d’un droit de propriété absolu se font beaucoup plus discret lorsqu’il s’agit d’expropriation, comme, un exemple au hasard, à Notre-Dame des Landes. C’est vrai qu’on les imagine mal installés sur un tracteur à coté des agriculteurs locaux…

S’il est nécessaire…

« S’il est nécessaire, je ferai appel à l’ensemble des moyens disponibles, la réquisition fait partie de cette panoplie. »        Cécile Duflot, 27 octobre 2012

En est-on encore à se demander s’il est nécessaire ? Quelques mots de la ministre déclenchent une tempête médiatique, de fausses polémiques en déclarations nuisibles. Chaque premier novembre, on découvre que la rue tue, que la pauvreté tue. Chaque premier novembre, chacun a son idée pour « résoudre la crise du logement ». Cinq mois de gouvernement, et il faut encore étudier, peut-être, réquisitionner ? Que de temps perdu. Quand les femmes de ministres ne peuvent plus rentrer chez elles sans rencontrer de mendiant, il est temps d’agir. Chasser les pauvres est simple, procès, police, expulsion. Et si la justice est trop lente, on laisse faire la solidarité, les voisins et leurs bidons d’essence. On a toujours plus pauvre que soi à maltraiter, à expulser. Il y a la trêve hivernale, alors il faut faire vite ! La rue tue, été comme hiver. C’est pour les réquisitions qu’il faut faire vite, pas pour les expulsions. Dix personnes dehors deux jours avant la trêve, pour un immeuble du vingtième arrondissement.

S’il est nécessaire, l’État fera respecter la Loi.

S’il est nécessaire, l’État ouvrira des places, dans le plus grand centre d’hébergement d’urgence : le cimetière de Thiais.

La rue tue, ce n’est pas nouveau : Il y a cinquante-huit ans, le ministre du logement Maurice Lemaire assistait à l’enterrement d’une petite fille tuée par le froid. Mme Duflot, irez-vous à l’enterrement de Bernard, mort ce samedi à Paris ?

S’il est nécessaire…

Censure de la loi Duflot

Le Conseil constitutionnel a censuré la loi Duflot relative à la mobilisation du foncier public en faveur du logement et au renforcement des obligations de production de logement social. Comment pouvait-il en être autrement ? Le droit (et si ce sont les parlementaires qui font la loi, il ne faut pas oublier que la loi, c’est du droit.) Le droit, donc, connaît des formalismes et des règles de procédures qui peuvent être casse-pied, strictes et rébarbatives, mais qui n’en sont pas moins des garde-fous. L’Etat de droit dont se gargarisent tous nos responsables, c’est, bien plus qu’un Etat utopique où tous les individus respecteraient la loi, un Etat qui lui-même respecte son droit.

Que s’est-il passé ? S’agissant d’un texte qui concerne en premier chef les collectivités territoriales, c’est le Sénat qui devait se prononcer en premier. Le projet de loi adopté en conseil des ministres le 5 septembre a donc été déposé au Sénat  l’après-midi même. La Constitution prévoit que dans chaque chambre, les textes déposés soient examinés par des commissions spécialisées avant d’être discutés en séances publiques. Le 11 septembre au matin, la commission des affaires économiques du Sénat se réunissait donc pour examiner les quinze articles du projet de loi, et adopter une quinzaine d’amendement. Or, l’examen en séance publique commença le même jour, non pas sur le texte adopté par la commission, mais sur le projet de loi du gouvernement, non modifié. En passant ainsi avec pertes et fracas sur le travail de la commission, le Sénat violait avec une telle flagrance la Constitution qu’il ne fallait pas être grand clerc pour prévoir la censure par le Conseil constitutionnel. A tel point que le Premier ministre, dernière hérésie, annonça avec quelques heures d’avance une décision qui n’était pas encore officiellement prise.

Il est des victoires qu’on offre à l’ennemi. En agissant ainsi dans le simple but d’afficher un volontarisme politique, le gouvernement pensait-il vraiment que l’UMP allait s’abstenir de saisir le Conseil constitutionnel ? Cela relève soit de la naïveté, coupable à ce niveau, soit d’un cynisme important. D’aucuns pensent en effet qu’un autre projet de loi, ou un autre ministre, n’aurait pas fait les frais de cette erreur. Jean-Pierre Bel, président du Sénat, a beau jeu d’appeler maintenant à un meilleur respect du travail législatif, c’est bien a lui, in fine, qu’est revenu la responsabilité de valider le calendrier du gouvernement.

Les conséquences politiques sont lourdes. Au-delà de l’amateurisme que cette histoire dénote, c’est toute une loi qu’il faut revoter. Certaines dispositions n’avaient été adoptées qu’après bien des débats, et, au Sénat, le parti socialiste doit composer avec les autres groupes de la majorité : communistes, écologistes et radicaux. Ce n’est qu’avec l’ensemble de ces quatre groupes qu’ils peuvent espérer obtenir la majorité.

La saisine du Conseil constitutionnel par 60 députés et 60 sénateurs ne visait pas uniquement la procédure d’adoption du texte, mais également les articles 3, 10, 15 et 16. Censurant la loi dans son intégralité, le Conseil ne s’est évidemment pas prononcé sur ces articles, et il est plus que probable qu’une nouvelle saisine sera faite à l’issue du nouveau calendrier. En attendant, ce sont des projets qui sont bloqués, des dispositions inapplicables et des logements qui ne seront pas construits.

Pourtant, le gouvernement avait bien d’autres moyens de faire preuve de volontarisme tout en évitant ce désastre politique : il annonce aujourd’hui une circulaire pour empêcher l’expulsion des prioritaires DALO. Circulaire tout ce qu’il y a de plus conforme aux lois existantes et à la jurisprudence, elle ne nécessite que la signature de ministres. Combien de personnes ont été expulsées depuis deux mois, qui auraient pu ne pas l’être ? Et qu’on ne vienne pas me parler du préjudice de ces pauvres propriétaires : dans le cas de refus d’expulsion, le loyer est pris en charge par l’Etat, ce qui coûte d’ailleurs moins cher que la mobilisation des forces de l’ordre et les nuitées d’hôtel.

Qu’attend encore aujourd’hui le gouvernement pour annoncer quelques réquisitions d’immeubles vides ? Quand l’UNPI elle même reconnaît que plusieurs centaines de milliers de logements pourraient être remis immédiatement sur le marché ?

Tout ne peut être fait par décret ou circulaire, et c’est heureux que le parlement ait à ce prononcer sur le sujet du logement, comme sur d’autres. Mais de nombreuses dispositions existent déjà dans nos lois, qui ne demandent qu’à être appliquées. Mais il faut pour cela une véritable volonté politique qui se distingue d’un volontarisme de façade.

Les promesses de madame Pécresse

Cet article a été publié précédemment sur un libéblog tenu par Jeudi Noir.

Valérie PécresseLe 21 janvier dernier, nous avions profité d’un meeting de l’UMP à deux pas de la place des Vosges pour interpeller Valérie Pécresse sur les problèmes de logement en Ile-de-France, en particulier pour les jeunes. Comme les gardes du corps de François Fillon s’étaient invités (gentiment) dans la discussion, Valérie Pécresse nous a conviés quelques semaines plus tard sur sa péniche de campagne. A vrai dire, il n’y a pas eu d’annonces fracassantes. Enfin, presque, mais vous allez voir…

Nous étions donc reçus par la candidate et pas par la ministre, c’est-à-dire par celle qui fait les promesses et pas par celle qui est censée les tenir. Premier point, qui peut être réellement intéressant, elle ne veut pas faire de distinction entre étudiants, apprentis, jeunes travailleurs…  Si elle devient présidente de la Région, elle veut construire des logements pour tous! Comme il y a un véritable manque de logements, il faut faire feu de tout bois (je vous passe le couplet « Huchon, l’a rien foutu »).

Une chance, elle est tombée sur un architecte –un vrai– Wilmotte, il s’appelle. Il propose de faire des petits cubes en bois, 13m2 pour les célibataires, 24m2 pour les couples. On pose le tout sur une barge placée en bord de Seine, comme ça pas de problème de foncier à résoudre. Il y a le même projet à Lyon. Cependant, comme dans Paris intra-muros, c’est un peu difficile de placer des barges sur tous les quais, Valérie propose un autre projet, de Jean Nouvel celui-là: un pont habité sur la Seine, du côté de Tolbiac. Au premier niveau, des commerces et restaurants qui financent la construction, au deuxième niveau un « Learning Center », et au troisième, 1000 chambres étudiantes. J’ai quelques doutes sur les 1000 chambres. Même en les montant sur 2 niveaux, ça nécessiterait de couvrir la Seine sur plusieurs centaines de mètres de long, sans parler des problèmes d’éclairage.

Bref, de grands projets, très beaux, censés coûter moins chers que des constructions classiques, mais qui sont plus de l’ordre du gadget que d’une véritable politique de logement. Quand on fait remarquer que c’est très bien de vouloir construire –c’est nécessaire– mais qu’on pourrait peut-être commencer par ne pas démolir, en donnant l’exemple de la Cité Universitaire Jean Zay à Anthony, Valérie Pécresse s’exclame « mais vous savez très bien que c’est un problème politique« , rappelle que le département des Hauts-de-Seine s’est engagé à remplacer les chambres démolies (où? quand?) et change de sujet.

C’est vrai, quelle naïveté de notre part aussi de vouloir parler de problème politique avec une tête de liste aux régionales, accessoirement ministre responsable des CROUS… Intéressons-nous plutôt aux vrais sujets! D’ailleurs, avons-nous un casier judiciaire vierge? Après tout, Jean Perrin, l’inénarrable président de l’UNPI (l’Union Nationale de la Propriété Immobilière) nous a bien comparés à des pirates qui prennent les enfants en otage dans les maternelles… Aussi, quand on émet un doute sur les engagements de la ministre, par exemple à propos des travaux du 24, rue de la Harpe qui n’ont toujours pas commencé plusieurs mois après la date prévue, elle est toute surprise et s’engage à vérifier ce qu’on lui dit, ce qui est très gentil de sa part. Enfin, on aborde presque au hasard le sujet de la Marquise, et là, on s’entend répondre que les habitants étudiants pourraient peut-être obtenir une chambre en CROUS jusqu’en août prochain… Quel dommage qu’ils ne l’aient pas obtenue en septembre dernier !

Quand la police protège les délinquants

Cet article a été publié précédemment sur un libéblog tenu par Jeudi Noir.

Photo 25, rue de l'EchiquierLe 25, rue de l’échiquier, dans le 10ème arrondissement, est un immeuble de logement social. Ou plutôt, il aurait dû être un immeuble de logement social. Squatté entre 2004 et 2007, il appartient maintenant à ICF La Sablière, une SA HLM créée à l’origine pour loger les cheminots. Les anciens squatters avaient quitté ce bâtiment de plusieurs milliers de m2 lorsque la société avait déposé un permis de construire, le 16 novembre 2007, pour en faire plus d’une soixantaine de logements. Malgré les 2 millions d’euros investis par la mairie de Paris, aucun travaux n’a encore commencé.

Puisque cet immeuble est resté vide, une quinzaine de ménages sans abris ont investi les lieux voilà plus de trois mois. L’occupation n’ayant pas été dénoncée dans les 48 heures, la loi reconnaît donc cet immeuble comme leur domicile, et ils ne peuvent en être expulsés sans décision de justice.

Tout cela est bien connu de tous, propriétaires, mairie, policiers.

Pourtant, jeudi 28 janvier, des vigiles se disant mandatés par ICF ont pénétré de force dans les logements, accompagnés de chiens, pour expulser tout le monde. Les habitants ayant eu le dessus dans la bagarre qui a suivi, la société de gardiennage a alors changé de tactique. Laissant une petite troupe dans le couloir, les vigiles se sont contentés de bloquer le passage.

Depuis jeudi, en toute illégalité, plus personne ne peut rentrer dans cet immeuble sans leur accord. Les occupants sont divisés en deux groupes: l’un est de fait séquestré à l’intérieur du bâtiment, tandis que l’autre dort sur le trottoir, au pied de l’immeuble. L’eau, la nourriture, les médicaments (l’une des personnes à l’intérieur est cardiaque) sont passés dans un sac suspendu au bout d’une corde par la fenêtre du premier étage. Alerté, le DAL, l’Intersquat et Jeudi Noir se sont rendu sur place mardi, avant d’être stoppés par le commissaire de l’arrondissement. D’après lui, un arrêté de péril devrait être pris, mais il n’a aucun papier à présenter. Et quand on demande à entrer, il prononce un nouveau refus, poli mais illégal.

On se prend à rêver de sanctions contre ces gens, pas tellement les vigiles eux-mêmes qui gagnent leurs vies, mais contre le propriétaire qui commandite ces actions, contre les policiers qui bafouent la loi et souillent leurs uniformes.. La réalité, c’est qu’aucune sanction ne sera prise. Parfois, on parvient à faire reculer le propriétaire. L’année dernière, il a fallu une caméra, deux avocats et trois élus pour que la police, à quatre heures du matin, laisse les occupants réintégrer leur domicile de la rue de Candie. Aucun article dans la presse, aucune sanction.

La loi protège la propriété, et c’est normal. Mais la loi protège aussi les êtres humains. Comment peut-on arguer que certes, il y a le droit au logement mais qu’on ne peut pas se faire justice soi-même en squattant, quand des sociétés HLM, des mairies, la police elle-même ne respectent pas les lois et utilisent la force plutôt que la justice?

Ce qui fonde la société, c’est le droit. Qu’un individu viole la loi, et il est sanctionné. Quand la société viole ses lois, elle se détruit de l’intérieur, et rend illégitime toute autorité.

PS : Dans la journée du 3 février, la préfecture de police a procédé à « l’évacuation » du bâtiment sans la présence d’un huissier. Les 18 habitants dorment depuis sur le trottoir au pied de l’immeuble.